« Un projet de méthanisation transforme immanquablement le territoire » - Etude Cisca en partenariat avec GRDF

« Un projet de méthanisation transforme immanquablement le territoire » - Etude Cisca en partenariat avec GRDF

GRDF et le Centre d'innovations sociales Clermont Auvergne (Cisca) ont mené une recherche-action participative sur l'acceptabilité sociale des projets d'unités de méthanisation. En croisant les perceptions des agriculteurs porteurs de projets, des collectivités, des industriels, des riverains, ils ont travaillé sur les postures qui permettent de réduire l'inacceptabilité sociale de tels projets.   

Tous les projets d’aménagement ont des conséquences sur les territoires, et parce qu’ils viennent bouleverser un ordre établi, ils soulèvent des appréhensions, des réticences, voire des oppositions. Pourtant, une étude de l’institut Ifop réalisée en 2022 révèle que la méthanisation et le solaire sont perçus positivement par 85 % des répondants, et que 79 % d’entre eux seraient favorables au développement de la méthanisation dans leur région.  

« Chez GRDF, nous accompagnons les porteurs de projet, nous conseillons les collectivités. Mais la partie acceptabilité n’est pas notre domaine d’expertise premier. C’est pourquoi nous nous sommes entourés du Cisca pour aborder ce sujet autrement et contribuer à la connaissance de la concertation et du dialogue territorial. Le Cisca a sur ce point une approche et une méthodologie particulières et plutôt disruptives », note Léana Fiorito, Chargée de développement biométhane, GRDF Sud-Est. L’objectif de cette étude était de mieux comprendre les conflits que peut engendrer la filière méthanisation et identifier les facteurs qui ont pu conduire à l’abandon de certains projets. Dès lors, quelles actions entreprendre pour faciliter l’appropriation locale de ces projets ? 

Rencontrer l’ensemble de l’écosystème 

Pour mener cette recherche-action collaborative, le Cisca est d’abord allé sur le terrain, à la rencontre de l’ensemble de l’écosystème concerné par un projet de méthanisation : les agriculteurs porteurs de projet bien sûr, mais aussi les élus, les riverains, le monde associatif, les collectifs d’opposants. De manière à prendre en compte les réalités territoriales et sociologiques dans leur diversité, il a mobilisé notamment des chercheurs en géographie et en communication. « C’est dans la mobilisation de ces deux expertises - comment on fait un travail sur le développement territorial et comment on apprend à communiquer – que tout s’est joué dans notre enquête », révèle Pierre-Friedrich Ribolzi, facilitateur au Cisca. Il a ainsi été démontré que des marges de manœuvre sont possibles à condition que l’on fasse exister le dialogue dès le début du projet. Comme en témoigne Nathan Lamat, agriculteur et co-porteur d’une unité de méthanisation à Brioude (Haute-Loire) : « Nous avons choisi de présenter notre projet aux conseils municipaux des communes concernées - auxquels ont participé aussi les habitants – dès que la phase de faisabilité a été actée. Nous sommes allés jusqu'au porte-à-porte des habitations les plus proches, pour expliquer notre projet dans le détail. Lorsque vous leur expliquez, par exemple, que cela représentera trois camions supplémentaires de plus par jour, vous rendez les choses plus concrètes et acceptables ».  

De l’inacceptabilité à l’acceptabilité 

« Le Cisca n’a pas cherché à produire des outils clés en mains, pour rendre les projets acceptables. Il a exploré un autre chemin : travailler sur les postures qui visent à réduire l’inacceptabilité sociale », poursuit Pierre Friedrich Ribolzi. Le principal résultat de notre enquête, c’est bien ce constat : un projet est – originellement – inacceptable puisqu’il va transformer un territoire qui jusque-là, fonctionnait bien sans lui. Parce que le projet peut être très beau sur le papier – règlementairement, financièrement, techniquement - mais être inacceptable du point de vue du territoire, parce qu'on n'a pas pris le temps d’aller à la rencontre de ceux qui y habitent et y vivent.  Parce que l’on n’a pas pris le temps d’écouter, d’expliquer, de dialoguer, de prendre en considérations les représentations et les manière d’être. « C’est ce que le Cisca a montré : ces projets-là, transforment : physiquement (canalisations, routes, construction), sociologiquement (dans les perceptions, les représentations que chacun se fait de son territoire). Dès lors, il est logique, normal, entendable, légitime que le territoire ait son mot à dire ! Il y a donc un intérêt réel à trouver des marges de manœuvres pour réduire l’inacceptabilité du projet et faire en sorte d’obtenir l’adhésion et – in fine- la faisabilité du projet », analyseLéana Fiorito. 

Des ambassadeurs pour faciliter le dialogue 

Mettre tout le monde autour d’une table est rarement le moyen d’aboutir à rapidement une solution apaisée. Dès lors, l’étude s’est attachée à identifier quelles seraient les personnes en mesure de faire dialoguer cette diversité d’acteurs, de points de vue et de représentations. En clair, des personnes qui ont une connaissance fine de ces écosystèmes, qui arrivent à comprendre un peu tous les mondes, les enjeux, les manières d’agir et de parler et qui sache les « traduire ». « C’est en fait une posture de « médiation/traduction », tenu par une personne capable de faire se rencontrer ces différents mondes, de les faire dialoguer en apportant cette facilitation qui consiste à « traduire » les discours et les enjeux pour qu’ils soient compréhensibles et entendables par les autres parties prenantes », reprend Pierre Friedrich Ribolzi.  

Réduire l'inacceptabilité passe par la capacité à instaurer ce dialogue médiatisé. Pour Cisca, les agents salariés de GRDF notamment ceux occupant des fonctions spécifiques telles que les chargés de développement territorial ou les responsables de projets, ont cette capacité à devenir des ambassadeurs du projet de méthanisation et à s’entourer d’alliés, autrement dit de tiers de confiance qui seront porteurs de messages mobilisateurs sur le territoire.